Merci. Sincèrement, merci à ma collègue de travail. C’est grâce à elle, que ma vie a bousculé et que j’ai pris un chemin vers la guérison, à me retrouver, à me recentrer, à redécouvrir mes passions et ma créativité.
C’était durant une session de team building avec notre équipe. Ça faisait 6 mois que j’étais en poste, et il y avait de la tension entre nous dans l’équipe. J’ai abordé le sujet, l’éléphant dans la pièce ; Étais-je la cause de la tension, depuis mon arrivée ?
Tout le monde a pris parole, c’est important de s’exprimer. Quand c’était à son tour, elle a remarqué que j’étais la goutte qui a fait déborder le vase… les changements, il y en a eus, un après l’autre depuis 2 ans. Et mon arrivée dans l’équipe, tu sais, c’était difficile. Je suis venue avec mes gros sabots, clop clop clop clop…
Je l’ai écouté… je n’ai pas répliqué, et j’ai encaissé. Elle n’a jamais su à quel point que ses paroles m’ont blessé.
Les dynamiques se sont améliorées après cette journée. Avec les autres co-équipiers, on a trouvé notre groove. Mais avec elle, 2 mois plus tard, c’était bordélique, voire hostile. Je suis devenue super paranoïaque, et j’ai commencé des crises d’angoisses, chose que je n’avais pas fait depuis 10 ans.
J’ai demandé de la médiation. Il faut que ça se règle. Pour moi, pour elle, pour l’équipe… la situation était intenable et malsaine.
Et pour moi, je suis retournée consulter, chose que je n’avais pas fait depuis 10 ans. Les crises d’angoisse, ça m’appartient, et c’est à moi de trouver comment les gérer.
Chose à savoir, c’est que ma vie les dernières années, elle était remplie de stress, un chaos après l’autre, sans répit. Au travail (mon ancienne job), je faisais face à des heures de fou, des déceptions, le manque de reconnaissance et à la misogynie (sujet d’un autre article de blogue à venir). Je n’en pouvais plus, je ne respirais plus. J’étouffais. Au plan personnel, la santé de ma mère- physique et mentale- était (est toujours) dans un déclin important, qui grugeait (gruge toujours) mon énergie. Ma maison était à vendre en pleine crise de pandémie. J’ai eu une inondation de mon sous-sol, j’ai eu une famille de rats qui ont squatté mon sous-sol. Je me suis blessée le pied, mes 2 ligaments de ma cheville droite étaient déchirés. Mes 2 chiens étaient malades, et j’ai dû subir le deuil, un après l’autre, de leurs décès. J’ai adopté un autre chien, un malamute de 125 livres qui me terrorisait, qui m’attaquait (moi, ma famille, mes amis, les autres animaux). J’ai acheté une maison qui a nécessité des travaux majeurs, durant le temps que j’y habitais. J’ai déménagé ma mère à une autre résidence qui offre plus de soins, sur un étage codé. Elle est tombé 2 jours après le déménagement. Elle s’est fracturé son pied, et elle a subi une chirurgie le 25 décembre, sans que je puisse la voir (pour 2 mois), puisque l’hôpital était en confinement. Elle était en centres de convalescence (au pluriel, oui) pendant 5 mois, ce qui a empiré son état de santé mentale. Je ne travaillais pas, et l’assurance-emploi a fucké mes paiements ; impossible de recevoir ce qui m’était dû. Et ce n’est qu’une liste partielle de ce que je vivais. Ouf.
Je suis devenue catatonique… je subissais une paralysie mentale. Mon élastique était étiré de trop, il a cédé /je ne rebondissais plus.
Je pensais, après 3 mois de repos, que j’étais prête à rebâtir ma vie et à retourner au travail. J’ai trouvé un emploi qui cochait toutes mes boîtes, et qui pourrait m’accorder une belle qualité de travail/vie.
À vrai dire, j’aurais dû prendre quelques mois de plus…
Revenons à nos moutons. Revenons à ma gratitude envers ma collègue.
Gros sabots… mes gros sabots.
Après réflexion, pourquoi étais-je blessée par ses/ces mots ?
Sur la défensive, toujours sur la défensive. Toujours à me justifier. Ai-je ma place ? Suis-je assez bonne ? Durant mes 20aines ++années dans le milieu de la construction, j’ai dû m’adapter, former une carapace, me prouver, et me prouver encore et encore. Se faire respecter comme une personne compétente qui a sa place quand t’es une femme dans une mer d’hommes, c’est un processus sans fin.
Mais même avant ça. Ma place au sein de ma famille, dès un très jeune âge, ce n’était pas gagné. J’ai dû m’adapter, former une carapace, me prouver et me prouver encore et encore.
Et là, au travail, entouré de personnes qui sont médaillées de diplômes du plus haut niveau. Moi avec mon degré universitaire de premier cycle en beaux-arts, je suis qui, moi ? Eh bien, mes connaissances et mes compétences, je les ai gagnées, à travers beaucoup d’épreuves. Je me suis plongée dans l’étude de la santé et sécurité. J’ai appris sur le tas. Je suis autodidacte. Je suis passionnée par cet univers. Même sans la reconnaissance par le biais d’un diplôme, je m’y connais.
Me justifier, toujours à me justifier.
Après réflexion, pourquoi ai-je à me justifier ? On m’a embauché grâce à mes compétences. Alors, pourquoi être blessée par ses/ces mots ? Je n’ai pas honte de dire que je suis compétente, et je n’ai pas à le cacher.
Je me suis réapproprié mes gros sabots. Je les mets et je les porte avec fierté. Clop clop clop clop.
Et je voulais l’exprimer/m’exprimer. Avec mes pinceaux, avec mes huiles, avec mes canevas. Chose que je n’avais pas faite depuis 10 ans. Me définir sur mes propres termes. Dans le langage que je connais et qui m’allume.
J’ai commencé à peinturer. Un premier tableau. Un autoportrait. Mes sabots.
Un deuxième tableau. Un autoportrait. Mes sabots.
J’ai consulté. J’ai fait face à mes peurs. À mes frustrations. À mon état catatonique. À mes crises d’angoisses.
J’ai pu faire face à la médiation. Chose pas facile, j’anticipais les crises d’angoisse. J’ai fait mes demandes. J’ai reçu les siennes.
J’ai fait un troisième tableau. Un autoportrait. Mes sabots.
J’ai commencé à trouver mon groove, mon sens. Ma voix par le biais des pinceaux est revenue. Ma joie à travers mes tubes de rouge, jaune, bleu et toutes les couleurs parsemées entre elles est réapparue.
J’ai commencé à donner des leçons de peinture à un ami.
J’ai commencé à peindre ensemble avec une amie, chez moi.
Je commence à réfléchir de faire un studio artistique chez moi.
Les sessions de médiation ont mené à des ententes et des lâcher prises. Ce qui ne m’appartient pas ne fait plus partie de mon vase qui ne déborde plus.
J’ai fait un quatrième tableau. Un autoportrait. Mes sabots. Je me redéfini.
Mon esprit est tranquille. Mais mon énergie est en pleine ébullition.
À mon cinquième tableau, mon autoportrait, mes sabots, eh bien, je les pendille de mes orteils. Mes sabots deviennent abstraits, une abstraction de qui je suis.
Merci, chère collègue. Tu m’as aidé à me retrouver.
Le sixième et dernier tableau de ma série, le plus réussi, eh bien, il s’appelle « plus de sabots ».