Manifeste pour l’inclusion des femmes dans le secteur de la construction : Une approche visant l’intégration, le soutien et le maintien durable.

12 août 2012 118Ce manifeste a comme but d’identifier les méthodes qui aideront à favoriser l’entrée des femmes au secteur et à améliorer la qualité de vie de toutes celles qui optent pour les métiers de la construction.  Cette démarche a été entreprise pour faire profiter tous et toutes de mes propres expériences personnelles, de la recherche et de mes connaissances de la matière en question.  Il est à noter que certaines des méthodes identifiées sont générales, tandis que d’autres plus pointilleuses, et qu’assurément, quelques-unes peuvent se transférer facilement à d’autres types de métiers non-traditionnels. Certains points sont des objectifs à court ou moyen terme, néanmoins, je cherche à identifier des méthodes qui auront un impact à long terme pour les femmes peu importe les carrières qu’elles choisissent.

Pourquoi la nécessité d’inclure les femmes dans ces types de métiers, reconnus comme étant genrés? À priori, il n’y a pas de métiers d’hommes. Il y a seulement la perception et l’approche qui les définissent et ceux-ci sont des constructions sociétales, basées sur des définitions limitatives, autant pour les femmes que pour les hommes. Les études, recherches et l’histoire nous ont démontrés que la mixité dans un milieu de travail aide au développement organisationnel et personnel ainsi qu’à la cohésion et à l’enrichissement sociétale. La vraie question à poser sera plutôt pourquoi la résistance d’inclure les femmes dans les secteurs tels que la construction?

 

Préface

 

Afin de comprendre mes qualifications et d’où je viens avec ce manifeste, il est de mise de vous donner un peu d’information sur moi et de mon parcours; je suis, de prima bord, une militante des droits de la personne depuis toujours.  J’ai été impliquée dès un jeune âge dans des causes variées, que cela soit contre le système d’apartheid en Afrique du Sud ou les escadrons de la mort au Guatemala, à aider les femmes battues, à lutter contre la pauvreté, à donner soutien aux personnes aux emprises de problèmes de santé mentale et à faire de la sensibilisation de ces enjeux et plus.

J’ai franchi les métiers de la construction en 2000, suivant une formation d’un diplôme d’études professionnels, pour devenir électricienne de construction.  Ce DEP se faisait au même temps que je finissais un baccalauréat en beaux-arts. Étant artiste, je faisais déjà des travaux de rénovation dans le secteur résidentiel, notamment des mosaïques en céramique et des muraux et finitions de peinture décorative.  Je me suis lancée dans une quête plus sérieuse pour me trouver une carrière de mon goût. C’est au moment que j’ai posé quelques questions à un électricien sur son métier, que je me suis décidée vers cette nouvelle aventure. En toute transparence, ce monsieur en question a stimulé en moi un désir intense de devenir électricienne par son choix de paroles; en me disant que je ne pouvais pas faire ce métier d’homme. En essayant à tout prix de me dissuader il n’a qu’en réalité allumé un feu intense dans mon âme pour prouver que toute femme, notamment moi-même, pourrait entreprendre cette carrière.

J’ai été électricienne de 2000 à 2011.  J’ai travaillé sur des projets partout à Montréal, dans les secteurs commercial, institutionnel, industriel et du génie civil, pour une multitude de compagnies et de chantiers. Mon dernier chantier fut en Alberta.

Durant cette période, j’étais très impliquée au sein de mon syndicat; je voulais devenir la première femme déléguée de chantier, et la première représentante syndicale. Ce fut un parcours difficile.  Je siégeais sur une multitude de comités syndicaux, et j’avais toutes les connaissances et plus pour y atteindre. Cependant, il y avait des obstacles, principalement un incontournable; je suis une femme. Les femmes n’étaient pas le bienvenu, ni bien vus et perçus. On m’a itéré à maintes reprises que les gars ne seraient pas prêts à m’accepter dans ces rôles, et je me voyais, à chaque nouveau chantier, ne pas être prise en considération, être comptée pour du beurre.

Jour après jour, je faisais face à du mépris, à ne pas être prise au sérieux et à me faire harceler. Des fois, c’était des choses anodines, des « jokes » et du taquinage. Tandis qu’en d’autres instances, c’était carrément beaucoup plus grave. J’ai quand même réussi à faire ma place, mais mon statut, il était à rebâtir à chaque nouveau chantier, avec chaque nouveau gars avec qui je travaillais. Par ce qu’une femme, elle doit toujours se prouver digne d’être parmi ces hommes. À. Chaque. Fois.

J’ai insisté auprès de mon syndicat de bâtir un comité de la condition féminine. Dans le temps, il n’y en avait pas un seul parmi les cinq syndicats de la construction. C’était un débat qui a pris des années à le justifier. On m’a dit que ce n’était pas nécessaire, il n’y avait pas assez de femmes, ça sera mal perçu, bref toutes les raisons imaginables ont été convoquées. J’ai commencé par solliciter des femmes, et nous avons commencé à tenir des réunions clandestines, sans l’approbation syndicale. Mais je suis allée chercher des appuis et de l’aide, auprès de la maison-mère syndicale, et j’ai fait du lobbying à ne plus finir. J’ai fait du réseautage, et je me suis affiliée avec des groupes de la défense des droits de femmes. Je me suis impliquée auprès de F.R.O.N.T. (Femmes regroupées en options non-traditionnelles), même que j’y suis devenue sa vice-présidente (de 2008-2016).

Finalement, on m’a dit que pour avoir un comité, il fallait le prouver en faisant un mémoire! Il n’y a pas eu aucun autre instance ou comité syndical nulle part d’autre qui a dû passer par ces méthodes draconiennes pour prouver la nécessité de son existence.

Peut-être que l’on a exigé ce mémoire pour nous faire taire, ou pour nous faire échouer. Mais cela a eu l’effet opposé.  Nous, moi et mes consœurs que j’ai pu recruter, ont insistés auprès de notre local syndical de nous fournir la liste de toutes les électriciennes à Montréal.  Nous avons développé un sondage, et sur 88 électriciennes, nous avons eu des réponses de 80 d’entre elles.  Et ce fut le début du mémoire.  Nous avons développé un mandat, créé des statuts et règlements, analysé les résultats du sondage, et avons monté un plan d’action concret et irréprochable. Ce mémoire de 46 pages a été déposé, après des longues années justificatives, à un congrès syndical, suivi par un vote unanime pour entériner dans les statuts le premier comité de la condition féminine dans une instance syndicale de la construction.

Mon temps comme électricienne prenait sa fin. La dernière fois que j’ai mis mon sac à outils autour de ma taille était en début 2011, quand mon syndicat m’a envoyé travailler sur un plant d’huile en Alberta pour une compagnie Québécoise. On m’a avisé même avant mon départ que la compagnie en question ne voulait pas de femmes sur son chantier. On m’a avisé de garder un « low profile ». De ne pas me faire remarquer.

Comment ne pas se faire remarquer sur un chantier quand tu es la seule et unique femme parmi des centaines d’hommes? Comment que moi-même, je peux passer inaperçue, quand cela va carrément à l’encontre de tout mes fondements?

On a monté un dossier contre moi.  On voulait faire de moi un exemple, et on m’a congédié. Ce n’était pas joli. C’était la première fois que je me faisais congédier d’un chantier, et c’était plus que brutal. Tout ça, par ce qu’ils ne voulaient pas de femmes sur leur chantier.

J’aurais pu me battre, pour un congédiement non-justifié et discriminatoire; les preuves, je les avais (d’ailleurs, je les ai encore, je les ai toutes gardées). Mais mon syndicat n’était pas prêt de prendre ma défense, et je le savais, intrinsèquement, que ma carrière aurait été foutu, même plus que foutu. J’ai pris une porte de sortie, et j’ai demandé à la compagnie en question de s’excuser et de s’assurer que la situation ne se reproduise plus jamais, envers aucune autre femme. Et je le sais, intrinsèquement, que ma demande n’a pas été respecté.

J’ai changé de cap, et de carrières.  On m’a embauché comme conseillère en prévention auprès d’une association paritaire de la construction, et j’y suis restée pour un peu plus que sept ans. J’ai dû faire le deuil de mon ancien métier d’électricienne, et de mes aspirations syndicales, mais j’ai gagné tellement plus en me réinventant. J’ai eu une carrière enrichissante, valorisante, et j’ai grandi autant professionnellement que personnellement. J’ai eu plus d’impact sur le milieu de la construction que toute autre implication passée. Et j’ose espérer que j’ai été une source d’inspiration pour les femmes qui sont entrées dans le secteur après moi.

Je suis de nouveau en période de transformation; je suis devenue agente de prévention pour les chantiers de construction accréditée par la CNESST, et j’ai été admise à l’université pour une maîtrise en administration, que je vais débuter en automne prochain.

 

Ce manifeste ferme la boucle sur ce que j’ai commencé en 2000. J’espère que cela s’avèrera utile, et que cela pourra aider au secteur de se donner les moyens à se transformer, qu’il puisse devenir le potentiel qui se doit d’être.

 

Première partie

 

Avant de commencer à analyser comment les femmes peuvent trouver leur place dans un secteur non-traditionnel, il faut commencer par le début, et ceci se trouve bien avant qu’une femme enlace une paire de bottes de construction et se dirige avec ses outils sur un chantier. Pour que les femmes soient en mesure de considérer un choix de carrière en construction, qu’elles soient à l’aise dans leur choix, et la société pour autant, il faut :

·       Que les hommes, à la naissance de leur nouveau-né, prenne le congé parental dont ils ont droit, dans son entièreté. Qu’ils tissent des liens intimes avec leur enfant. Qu’ils s’impliquent dans l’élevage quotidienne de l’enfant. Ceci mène à avoir un point de vue fluide et évolutif sur les rôles familiaux entre les hommes et les femmes.

·       Que les parents modifient leurs approches genrées envers leurs enfants. C’est-à-dire :

1.       De ne pas féminiser et masculiniser les espaces d’enfants basées sur le sexe de l’enfant et sur des couleurs, notamment rose et couleurs pastel pour les filles versus bleu et couleurs primaire pour les garçons.

2.       Idem pour les vêtements.

3.       De valoriser les traits de curiosité, d’énergie, de dextérité et d’intelligence des filles et de réduire l’attention misée sur ses traits physiques et ses vêtements.

4.       De valoriser les traits d’empathie et de gentillesse des garçons et de réduire l’attention misée sur son niveau d’énergie.

5.       D’offrir des jouets mixtes aux deux sexes; c’est-à-dire, autant des poupées aux garçons que des camions aux filles, entres autres. De ne pas tomber dans les pièges de marketing des compagnies de jouets, ni à de la pression des autres envers ses enfants.

6.       D’arrêter de Cendrilloner les filles en les traitant de princesses, en valorisant tout le flafla des histoires Disney et de la demoiselle en détresse qui doit se faire sauver par le prince charmant.

7.       D’enseigner dès un jeune âge l’utilisation des outils manuels aux filles, à quoi ça sert, et à les encourager de les utiliser/ bâtir avec.

8.       D’enseigner dès un jeune âge aux garçons des recettes de cuisine et l’entretien ménager. D’encourager la participation à ces activités.

9.       D’enseigner les sports typiquement genrés tels que le baseball ou le hockey aux filles, et la danse aux garçons.

10.   D’encourager des aspirations variées aux enfants; c’est-à-dire, une pompière ou femme astronaute pour une fille et un artiste ou un infirmier pour un garçon.

 

·       Que les parents modifient leurs approches genrées envers eux-mêmes. C’est-à-dire :

1.       D’avoir un partage équitable de tâches ménagères.

2.       Que les hommes soient autant à l’aise de laver le bol de toilette que de tondre le gazon, et que les femmes soient autant à l’aise à pelleter et d’installer une étagère que de faire la lessive. Que leurs enfants puissent voir ces rôles partagés.

3.       Qu’il n’y ait pas de favoritisme envers qui conduit la voiture familiale quand les deux parents sont dans le même véhicule. Que les femmes prennent le volant et que les hommes soient passagers en face des enfants.

4.       Qu’il y ait communication, collaboration et d’entraide dans l’élevage des enfants, et qu’il n’y ait pas de favoritisme envers un ou l’autre enfant.

5.       Que les parents puissent jouer ensemble aux sports typiquement genrés avec leurs enfants tels que les mères lançant une balle de football à ses enfants et les pères à sauter la corde à danser.

 

·       Que les écoles modifient leurs approches genrées envers les étudiants. C’est-à-dire :

1.       Montrer des différents types de modèles et d’exemples aux enfants par rapport aux adultes.

2.       De ne pas différencier l’approche pédagogique et les résultats escomptés basés sur le genre.

3.       S’assurer que les livres d’instruction soient neutres et sans stéréotypes genrés.

4.       Que les jouets ne soient pas genrés.

5.       Que la cour d’école valorise aussi les jeux typiquement « féminine », et qu’il y a des espaces variés afin de favoriser des jeux mixtes. Avoir des espaces pour faire pousser des plantes que les enfants pourront entretenir.

6.       D’enseigner le civisme et le devoir citoyen à tous et à toutes, et ce, dès un jeune âge.

7.       D’encourager la mixité et le respect envers l’un et l’autre, en donnant aussi des lignes directrices sur ce qui est acceptable et ce qui n’est pas, par exemple le toucher, le droit de dire non et le devoir de l’écouter.

8.       D’offrir des cours obligatoires en économie familiale, de couture et de cuisine, de mécanique d’auto de base et des ateliers de charpenterie à tous et à toutes au secondaire.

9.       D’orienter les filles dans les domaines tels que les mathématiques et la science, et de donner des exemples concrètes de femmes qui ont atteint des postes importants.

D’orienter les garçons dans les domaines de personnes soignantes, ou de coiffeur, toujours en donnant des exemples de réussites.

10.   D’orienter les filles qui ne sont pas intéressées à poursuivre les études dans des domaines tels que la construction, et valoriser ces types de choix.

 

·       Que la société modifie ses approches genrées envers les citoyen.ne.s. C’est-à-dire :

1.       En arrêtant de sexualiser des jeunes filles pré-pubescentes.

2.        En arrêtant de mettre des attentes irréalistes envers le physique des femmes.

3.       En encourageant des rapports hommes-femmes basés sur le respect et le respect de choix.

4.       En favorisant la parité dans les instances de travail, et en mettant en place des mécanismes qui le garantiront.

5.       En enlevant les barrières systémiques que peuvent rencontrer les femmes à certains types de carrières.

6.       En valorisant les différences entre les hommes et les femmes, tout en s’assurant que ces différences ne créent pas d’obstacles dans les échanges et au travail pour l’obtention de promotion.

7.       En s’assurant qu’il y a conciliation travail-famille en toutes instances, et que les horaires ne défavorisent pas l’intégration au marché aux parents ni aux aidants naturels.

8.       Qu’il y ait valorisation et équité salariale de types de carrières, notamment ceux et celles qui sont considérés genrés. Par exemple, le salaire d’une préposée aux bénéficiaires devrait être le même qu’un éboueur.

9.       Que la consommation, la surconsommation et son marketing soient réduits, et que la valeur misée sur la croissance à tout prix soit éliminée

 

Ce n’est qu’en s’attaquant à ces points de front que l’inclusion des femmes dans des métiers non-traditionnels tel que la construction pourra réellement se faire.

 

Deuxième partie

 

Pour qu’il y ait une vraie inclusion des femmes dans le secteur de la construction, il y a une multitude d’approches à prendre. Les statistiques les plus récentes de 2017, selon la CCQ (Commission de la Construction du Québec) indique qu’il n’y a que 1.91% de femmes œuvrant dans le secteur (En 2016, le chiffre se situait à 1.62% de femmes).  De ce montant, la majorité, 57%, sont des apprenties, comparativement aux hommes, qui sont chiffrés à 26%.  Et ça, c’est avec des mesures mises en place depuis 1997 quand le premier programme d’accès à l’égalité des femmes soit rentré en vigueur; un programme qui a d’ailleurs été revisité et renforcé en 2015 afin d’augmenter le nombre de femmes dans la construction. Par contre, le Québec est toujours en dessous des statistiques pancanadiennes, et que nous avons la pire représentativité féminine du Canada en construction. Le taux d’abandon des femmes après 5 ans dans la construction est chiffré à 56% versus 35% pour les hommes.

C’est clair que les méthodes utilisées visant l’intégration et le maintien des femmes dans le secteur ne sont pas suffisantes. Bien que le PAEF (à noter que quelques de mes recommandations se retrouvent dans le PAEF) de la CCQ, révisée en 2015 a mis des efforts sur le processus, ce qui n’a pas été fait est l’établissement de quotas obligatoires.

Un point d’intérêt; le rapport sur les femmes de la construction- portrait statistique de 2017 de la CCQ utilise l’écriture épicène; de même que la CCQ a publié un guide sur la rédaction épicène, mais qui n’est nullement utilisée dans leurs autres rapports.

 

 Écoles

 

Pour que les femmes soient en mesure de choisir les métiers de la construction, d’avoir le soutien nécessaire, de s’intégrer au milieu d’une manière durable, il faut :

·       Qu’il y ait priorisation d’entrée des femmes aux écoles des métiers de la construction.  Dans ces écoles, il faut :

1.       Que ces écoles aient des politiques d’anti-harcèlement et de bien-être psychologique, qu’elles soient applicables et appliquées.

2.       Avoir un soutien adapté spécifiquement pour les femmes qui choisissent d’étudier un métier de la construction. Ce soutien doit entre-autres tenir compte du fait qu’il y a déséquilibre entre le nombre d’hommes versus le nombre de femmes.

3.       Le soutien doit inclure du temps supplémentaire offert dans les ateliers, pour contrer le fait que la majorité des femmes dans ces écoles n’ont jamais touché à des outils de leur vie, en revanche des hommes qui ont souvent travaillé manuellement.

4.       Qu’il y ait des formations spécifiques pour les enseignant.e.s sur l’intégration et la mixité dans leurs classes.

5.       Qu’il y ait des enseignantes dans toutes les disciplines enseignées.

6.       Que ces enseignantes soient données les outils appropriés afin d’assurer leur succès.

7.       Des endroits communs qui encouragent et sollicitent l’entraide entre les étudiantes de l’école. L’entraide devra se faire transversalement et qu’elle soit multidisciplinaire.

8.       Un système de mentorat, interne et externe, tout le long des études.

9.       Une transparence sans équivoque des défis que vont rencontrer les femmes à l’école et sur le marché du travail. Cette discussion doit être suivi par des méthodes de gestion et des mécanismes d’adaptation pour les femmes afin qu’elles puissent avoir les outils appropriés pour faire face aux défis qui les attendent.

10.   Des formations obligatoires et intégrées dans le curriculum pour les étudiant.e.s sur les notions de harcèlement et de discrimination. Ces formations doivent aussi aborder les sujets et les actes qui tombent sous la juridiction d’actes criminelles (ex : harcèlement et agression physique et agressions sexuels).

11.   Que les ateliers aient des outils et des équipements de protection individuels (EPI) spécifiques et adaptés pour femmes (ex : harnais de femmes et gants de petites tailles).

12.   Que les professeur.e.s dans les ateliers enseignent aux étudiant.e.s les méthodes de travail sécuritaires, en utilisant des équipements de manutention et des méthodes de travail qui tiennent compte de l’ergonomie.

13.   Que les écoles aient des centres de conditionnement avec des spécialistes au sein de l’école, et à défaut de, d’offrir des cartes-rabais à des centres de conditionnement privés.

14.   Que les écoles favorisent les principes de conciliation travail/famille, et à la mesure du possible aient des garderies au sein de l’école.

15.   Un système de placement auprès d’employeur.e.s ouvert.e.s et outillé.e.s à intégrer des femmes dans leurs équipes de travail.

16.   Des listes tenues à jour d’employeur.e.s qui embauchent des femmes, et qui maintiennent ces femmes à l’emploi auprès de leurs équipes.

17.   Des listes tenues à jour d’employeur.e.s qui ont eu des plaintes de harcèlement ou de discrimination déposées contre eux.

 

Législation et la CCQ

 

Pour assurer l’inclusion et le maintien des femmes dans leurs métiers de la construction, il faut :

·       S’assurer qu’il y a nombre croissant de femmes qui entrent dans le marché de travail et qui y restent. Le seul moyen efficace d’atteindre cet objectif est d’instaurer des quotas.

·       Ces quotas doivent être mis en place pour tout chantier gouvernemental, incluant les travaux publics et le génie civile, Hydro Québec, les hôpitaux, les écoles et toutes autres institutions et ce, à tous les paliers, que cela soit fédéral, provincial ou municipal. Le quota doit être un minimum de 3% de femmes sur les chantiers, proportionnellement montant pour les métiers où les femmes sont plus nombreuses (tel que les peintres). Ce chiffre ne doit pas inclure les femmes qui travaillent en administration (ex, comptable).  Ce quota se doit de se faire réviser à chaque deux ans afin de continuer la croissance. Il doit aussi y avoir des quotas mis en place pour les femmes cadres; c’est-à-dire, les ingénieures, chargées de projets, surintendantes et superviseures.

·       Les quotas doivent être instaurés pour les projets de construction ou des compagnies qui reçoivent de l’argent gouvernementale (ex; Bombardier, amphithéâtre au parc Jean Drapeau).

**** À noter, que le sujet des quotas est tabou et mal perçu dans beaucoup de cercles, et même par certaines femmes. Le terme « discrimination positive » est souvent utilisé pour décrire l’utilisation de quotas.  Je tiens à souligner que de laisser entrer une femme compétente dans un domaine n’enlève pas la compétence d’un homme, et en aucun temps favorise l’entrée d’une femme qui n’a pas sa place, mais plutôt d’ouvrir une porte qui lui est habituellement fermé. En aucun cas, cela s’avère à être discriminatoire envers les hommes, puisqu’à prima bord, la porte est toujours ouverte pour eux, et ce, peu importe leurs niveaux de compétences.

·       Offrir des incitatives de crédits d’impôts aux employeurs qui gardent à leur emploi une travailleuse pour une durée de plus de trois ans, à la suite d’un engagement écrit de cet employeur.e.

·       Féminiser les titres des métiers de la construction, sur les cartes de compétences des travailleuses (Ex; électricienne classe C, plâtrière, charpentière-menuisière).

*Ces termes se font revendiquer par les femmes depuis maintes années.

·       Que la CCQ mette en place un système qui vise à obtenir la parité homme-femme sur leurs conseils d’administrations.

·       Utiliser l’écriture épicène dans tous les documents destinés au secteur de la construction, et ce, peu importe d’où proviennent ces documents. D’enlever la phrase « L’utilisation du genre masculin a été privilégiée afin de ne pas alourdir le texte » du vocabulaire des différentes instances, que cela soit les documents de la CCQ, de la CNESST, des associations patronales, les syndicats et les associations paritaires telles que l’ASP Construction et l’IRSST. Ces instances doivent venir à la conclusion que l’utilisation du genre masculin dans des textes ne fait que de renforcer les sentiments d’exclusion des femmes.

 

Syndicats

 

Pour que les femmes soient en mesure de choisir les métiers de la construction, d’avoir le soutien nécessaire, de s’intégrer au milieu d’une manière durable, il faut :

 

·       Que les syndicats de la construction aient tous des comités de la condition féminine intégré dans leurs instances et dans leurs statuts. Que ce comité soit :

1.       Formé de femmes qui soient formés et qui peuvent offrir du soutien aux autres femmes et à tout membre du syndicat, incluant l’exécutif et la permanence.

2.       Qu’elles sont des femmes qui font partie intégrante de l’instance syndicale et du milieu de la construction. C’est-à-dire, des déléguées de chantier, et des contremaitres, par exemple.

3.       Que le comité soit un véhicule utilisé par tous les niveaux du syndicat, qu’il y ait un rôle et une autorité transversale.

·       Que les syndicats aient des politiques contre le harcèlement et la discrimination intégrées dans leurs instances, et qu’elles soient appliquées et applicables.

·       Que les syndicats de la construction forme ses délégués, ses élus, son exécutif et sa permanence sur la réalité des femmes, le harcèlement et les situations discriminatoires. Qu’ils soient capables de répondre aux besoins des femmes d’une manière approprié et avec des délais raisonnables. (Je n’utilise pas l’écriture épicène ici, puisqu’il n’y a à date qu’une ou deux femmes dans ces rôles ci-mentionnés).

·       Que les syndicats de la construction mettent en place un système qui vise à obtenir la parité homme-femme au sein de leurs comités variés, l’exécutif les élus et la permanence.

* Ce point, pour la totalité des syndicats de la construction prendra des années à développer, puisque la grande majorité d’entre eux n’ont aucune femme intégrée dans leurs différentes instances.

·       Que les syndicats de la construction aient;

a.       Des listes tenues à jour d’employeur.e.s qui embauchent des femmes, et qui maintiennent ces femmes à l’emploi auprès de leurs équipes.

b.       Des listes tenues à jour d’employeur.e.s qui ont eu des plaintes de harcèlement ou de discrimination déposées contre eux.

·       Que les cinq syndicats de la construction travaillent collaborativement ensemble pour promouvoir, aider et outiller les femmes dans le secteur. Qu’ils travaillent collaborativement avec les autres instances de la construction tels que les écoles, les employeurs, les associations patronales, la CCQ, les instances paritaires telles que la CNESST et l’ASP Construction à ce but ci-mentionné.

 

Organismes, Associations paritaires

 

Pour que les femmes soient en mesure de choisir les métiers de la construction, d’avoir le soutien nécessaire, de s’intégrer au milieu d’une manière durable, il faut :

·       Qu’il y ait un organisme paritaire dédié à faire le lien avec toutes ces instances mentionnées ci-haut, et que cet organisme s’assure un suivi et des réunions ponctuelles avec ces instances pour assurer des ponts et pour que les enjeux des femmes ne tombent pas entre les craques.

·       Que cet organisme paritaire soit aussi le lien entre les femmes de la construction, qu’elle offre des sessions rencontres et réseautage pour les femmes, des tables rondes, et du mentorat.

·       Que la CNESST intègre le principe de la santé psychologique au travail quand vient le temps d’inspections de chantier. Qu’ils s’assurent que les programmes de prévention aient des politiques contre le harcèlement et pour le bien-être psychologique.

·       Que la CNESST autorise ses inspecteurs et inspectrices d’arrêter les travaux quand ils.elles sont témoin d’un acte ou d’une parole qui porte atteinte à la santé psychologique d’un.e travailleur.e de la construction. Que des constats d’infractions soient acheminés à ces employeurs.

·       Que ces inspecteurs et inspectrices de la CNESST soient formés afin de déceler ce qui peut porter atteinte à la santé psychologique d’une personne, ainsi que sur le harcèlement et la discrimination.

·       Que la CNESST arrête de contester chaque demande d’indemnisation d’une personne aux emprises d’une maladie causée par une situation qui a porté atteinte à sa santé psychologique.

·       Que la CNESST mette en place un système qui vise à obtenir la parité homme-femme sur leurs conseils d’administrations ainsi que sur leurs divers comités.

·       Que l’ASP Construction offre des services conseils aux employeurs sur les méthodes de travail qui favorisent une approche de mieux-être au travail.

·       Que l’ASP Construction offre des formations destinées aux employeurs et leurs gestionnaires sur la santé psychologique et le mieux-être au travail. Qu’une formation soit aussi offerte aux travailleurs et travailleuses de la construction sur ce sujet, et que les principes d’harcèlement fassent partie de la formation.

·       Que l’ASP Construction rédige des guides sur la santé psychologique et le mieux-être au travail destinés à l’industrie, dont les sujets du harcèlement et la discrimination en feront part.

·       Que l’ASP Construction soit l’organisme de référence en matière d’outillage, d’EPI et des méthodes de travail sécuritaire pour les femmes. Que ces principes soient imbibés dans toutes ses formations.

·       Que l’ASP Construction mette en place un système qui vise à obtenir la parité homme-femme sur son conseil d’administration.

 

Associations patronales 

 

Pour que les femmes soient en mesure de choisir les métiers de la construction, d’avoir le soutien nécessaire, de s’intégrer au milieu d’une manière durable, il faut :

Que ces associations patronales

·       Aient une division/département / personne dédié à toute matière de la condition féminine au sein de la construction.

·       Puissent offrir des services de soutien et de l’information pertinente à ses employeur.e.s-membres qui ont besoin d’un appui particulier dans leurs démarches d’intégration et de maintien des femmes à leurs emploi.

·       Puissent offrir des services de mentorat aux femmes de la construction, et aux employeurs qui ont besoin d’aide dans leurs démarches.

·       Puissent offrir des services aux femmes qui veulent monter les échelons corporatifs.

·       Qu’ils aient des listes tenues à jour d’employeur.e.s qui embauchent des femmes, et qui maintiennent ces femmes à l’emploi auprès de leurs équipes.

·       Qu’ils aient des listes tenues à jour d’employeur.e.s qui ont eu des plaintes de harcèlement ou de discrimination déposées contre eux.

·       Travaillent collaborativement avec les autres instances de la construction tels que les syndicats, les écoles, les autres associations patronales, la CCQ, les instances paritaires telles que la CNESST et l’ASP Construction pour promouvoir, aider et outiller les femmes dans le secteur.

·       Aient des politiques contre le harcèlement et la discrimination intégrées dans leurs instances, et qu’elles soient appliquées et applicables. Qu’elles fassent parties intégrantes de leurs programmes de préventions qu’ils offrent à leurs clients.

·       Que les associations patronales mettent en place un système qui vise à obtenir la parité homme-femme sur leurs conseils d’administrations.

 

Employeurs

 

Pour que les femmes soient en mesure de choisir les métiers de la construction, d’avoir le soutien nécessaire, de s’intégrer au milieu d’une manière durable, il faut :

Que les employeur.e.s

·        Favorisent l’embauche de femmes, et plus particulièrement, la rétention de femmes parmi leurs employé.e.s . Assurent l’embauche des femmes au début d’un projet, et jusqu’à sa fin.

·       Aient des politiques contre le harcèlement et la discrimination, et sur la santé / mieux-être psychologique, que celles-ci soient pertinentes, applicables et appliquées.

·       Aient une approche conciliation travail/famille.

·       Assurent la formation aux travailleurs et travailleuses sur la santé psychologique et le mieux-être au travail, qui inclut les volets sur le harcèlement et la discrimination.

·       Ne tolèrent, en aucun temps et en aucune instance, des commentaires déplacés, une situation de harcèlement, d’intimidation et de discrimination, peu importe qui est l’instigateur. Qu’ils aient des mesures et des méthodes efficaces et rapides pour rectifier la situation et qui ne défavoriseraient pas en aucun sens la personne qui a subi ce tort.

·       Travaillent collaborativement avec les syndicats pour éradiquer les situations de harcèlement, d’intimidation et de discrimination.

·       S’assurent qu’en aucun temps se trouve des photos, images ou graffitis sur leurs chantiers, roulottes, salles de repos, toilettes, qui servent à discréditer les femmes, ou à les humilier, que ça soit intentionnelle ou non.

·       Offrent des outils et EPI adaptés aux femmes, et ce, sans en faire un exemple.

·       Favorisent des méthodes de travail ergonomiques pour tous et toutes, en tenant compte de méthodes de levage et de la manutention de matériaux.

*Ceci aidera à diminuer les blessures et les troubles musculaux-quélettiques que subissent nombreuses personnes qui œuvrent dans le secteur de la construction, et les coûts qui y sont reliés.

·       Aident les travailleuses à apprendre leurs métiers en leurs offrant des tâches différentes et variées pendant les périodes d’apprentissage. Aident à l’avancement des périodes d’apprentissages des travailleuses.

·       Offrent le potentiel de mentorat pour les travailleuses.

·       Donnent des tâches et des défis intéressants et valorisants aux femmes.

·       Offrent le potentiel d’avancement de carrière aux femmes; c’est-à-dire, leur offrir des postes de contremaitresses et de supervision.  Assurent qu’elles soient formées adéquatement pour entreprendre ses rôles.

* La majorité de femmes qui œuvrent dans le secteur de la construction sont des fonceuses. Une des raisons du taux d’abandon se vaut le manque de défis et de potentiel d’avancement.

 

 

Conclusion

 

Pour que les femmes soient réellement incluses et intégrées dans le secteur de la construction, ainsi qu’à tout autre secteur majoritairement masculin, les différents acteurs et actrices du milieu doivent croire au principe de la mixité et au bénéfice que cela remportera aux entreprises et au secteur.

L’approche doit tenir compte du fait que tant et aussi longtemps que la société insiste à nommer des types d’emplois genrés, la situation ne changera pas. Tant et aussi longtemps qu’il n’y a que des hommes autour des tables décisionnelles, la situation des travailleuses ne changera pas. Et surtout, quand la société dicte dès la naissance des filles et garçons que seront leurs rôles à jouer dans ce monde, les nombres de femmes dans la construction avancera à très petits pas, voir indiscernable.

 

L’approche d’inclusion doit se faire en partenariat avec tous ces joueurs. Ce n’est qu’à ce moment que la situation s’améliora.

 

Signé,

Valérie Bell

05-01-2019

6 Replies to “Manifeste pour l’inclusion des femmes dans le secteur de la construction : Une approche visant l’intégration, le soutien et le maintien durable.”

  1. Bravo, après avoir travailler plusieurs années avec les associations syndicales et patronales, La réalité est toujours la même pour les femmes dans la construction. De beaux discours mais peu d’action …les bottines suivent pas les babines. Ce sont des femmes Comme toi qui font avancée la valeur humaine avant toute chose.
    Merci Valerie

  2. Quel superbe manifeste Val! Juste Wow! Exactement ça… Je modifierais un seul point. La féminisation des cartes de la CCQ, on devrait voir sur TOUTES les cartes (hommes/femmes) plâtrier/plâtrière, électricien/électricienne et SURTOUT compagnon/compagne et apprenti/apprentie. Il me semble que ce serait juste normal en 2019 !? Si chaque confrère allumait tranquillement par des simples féminisations sur LEUR carte qu’il y en a des femmes sur les chantiers et qu’elles sont incluses aussi ça changerait tant de choses…

    1. T’as tant raison, Aiyana!! Merci pour tes commentaires! Faut pas oublier tout le travail d’arrache-pieds que toi tu as fait aussi, et que tu continues à casser les barrières de résistance!

  3. Wow what a huge effort this must hsve been, nicely done Val, I love how you offer solutions not just criticisms. Saddened & frustrated to read how you got “set up” in Alberta, disgusting that it can still go on nowadays😡😪🤬.
    I never realized how highly skilled you are, I know/knew you were intelligent but all of this you have accomplished in one lifetime,
    holy Hannah😮.
    Bravo, hats off to you and I’m bowing❤️👍👌😎🙏❣️

    1. Thanks, Jewelz, for your support. What happened in Alberta was pretty upsetting, but it made my resolve stronger. When you are only less than 2% of the work environnement, there tends to be further challenges, and lots of resistance.

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